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Généalogie

Les billets de cette catégorie concernent plus particulièrement les sujets liées à la généalogie.

Les pérégrinations de Geneviève Clark

Par Le 27/09/2021

La plupart des Québécois de souche trouvent leurs ancêtres au pays de la douce France. Il est cependant beaucoup moins courant pour des Français de trouver les leurs au Québec. Et pourtant, il y en a : trois ou quatre générations après l’arrivée des pionniers en Nouvelle-France, des Canadiens ont émigré sur le vieux continent. Citons par exemple les Lemoyne et les Rigaud de Vaudreuil, dont l’histoire est bien connue et qui ont quitté le pays après la chute de la Nouvelle-France. Mais que savons-nous d’autres familles, d’autres personnes issues de la masse anonyme du peuple parties vivre au pays de leurs ancêtres ? Peu de choses, en vérité. Et pourtant, il y a sans doute là plus d’une histoire étonnante à raconter. En voici une, celle de Geneviève Clark, une fille née au 7, rue des Jardins, à Québec, qui est allée vivre aux pays de ses aïeux, l’Angleterre, Rue Desjardins Québecpuis la France.

Geneviève Clark est née en 1780, à Québec, du mariage de William Clark, un soldat anglais sans doute, et de Geneviève Lépine dit Lalime, une Canadienne de deuxième génération. Or, voilà qu’un officier des troupes d’occupation britanniques, le lieutenant Richard Skottowe, fils de l’ancien gouverneur de l’île Sainte-Hélène, remarque la jeune fille qui, contrairement à sa mère, est illettrée. Il en tombe follement amoureux au point où, en 1799, il lui fait une offre exceptionnelle, soit celle de lui verser mensuellement la somme de 48 livres sterling jusqu’à ce qu’il lui demande de venir le retrouver en Europe. Et pour garantir cette exceptionnelle pension, il va jusqu’à hypothéquer ses biens.

Cette pension est importante, car elle se monte à la somme annuelle de 576 livres. Par exemple, à la même époque, le gouverneur de la Province of Quebec recevait annuellement la somme de 2 000 livres, le secrétaire et greffier, 400 livres et le procureur général 300 livres… Ainsi, la pension annuelle de Geneviève était-elle plus élevée que les appointements de deux des trois plus importants fonctionnaires du gouvernement !

Il faut dire que Geneviève est belle – pouvait-il en être autrement ? – ; elle paraît quatre à cinq ans de moins que son âge. Cheveux et teint foncés, elle mesure 1,52 mètre. De plus, on dit qu’elle a un air distingué et elle passe pour être une excellente cavalière. Elle ne maîtrise pas bien l’anglais – son accent français devait la rendre encore plus charmante.

Départ pour la Grande-Bretagne

En 1800, Skottowe regagne la Grande-Bretagne avec son régiment. L’année suivante, sans doute, l’officier fait mander Geneviève à Londres où elle arrive probablement au printemps de 1802. Quoi qu’il en soit, le 2 juillet 1802, le couple convole en justes noces, puis revient au Canada où il fait baptiser son premier enfant à Québec au printemps de 1803. Puis le couple retourne en Europe et s’installe à l’île de Wight, située dans la Manche. C’est là que Geneviève donne naissance à trois autres enfants dont deux mourront en bas âge. Enfin, elle accouche d'une fille en Écosse.

En 1813, on trouve Richard Skottowe sur la Côte d’Or, aujourd’hui le Ghana, où il est à l’emploi de l’African Committe qui y pratique la traite négrière. Il meurt à Cape Coast Castle à l’hiver 1813 et laisse dans le deuil, outre sa femme, trois enfants : un garçon et deux filles.

Geneviève quitte la Grande-Bretagne vers 1820 pour s’établir au pays de ses ancêtres maternels, la France. Jean-Baptiste Rémy Belle, un jeune homme de 22 ans, de 19 ans le cadet de Geneviève et de surcroît avoué de profession (c.-à-d. avocat et notaire), en tombe amoureux. Geneviève va alors s’installer à Tours, dans l’une des plus belles maisons de la ville, place Foire-le-Roi.

Le nouveau couple ne convolera pas tout de suite. Il va d’abord avoir Place foire le roi tourstrois enfants – trois filles – qui naissent en 1821 et en 1823, la première à Tours et les deux dernières à Orléans où Geneviève a déménagé ses pénates. Le couple a un comportement très XXIe siècle, car Rémy et Geneviève ne vivent pas ensemble si on en croit les recensements d’époque. Quoi qu’il en soit, Geneviève tombe malade en 1841. En mars 1842, elle épouse enfin son amoureux à Orléans où elle meurt huit mois plus tard à l’âge de 62 ans.

La descendance de Geneviève

         La descendance totale de Geneviève Clark, qui a eu six enfants viables, doit se monter à environ 90 personnes, peut-être plus, dont apparemment une seule porte aujourd’hui le patronyme de Skottowe et aucun celui de Belle. En effet, aucun des petits-enfants de la Québécoise n’a eu plus de trois enfants ; certains sont morts dans la prime enfance. De plus, 51,81 % de sa descendance connue est de sexe féminin, lequel ne pouvait pas transmettre son nom de famille sauf pour les enfants conçus hors mariage, et il y en a eus un certain nombre.

         Si le fils de Geneviève, Thomas Henry (1807-1868). qui s'est arrogé le titre de chevalier, est devenu riche comme Crésus grâce à un héritage comprenant cinq mines de plomb, sa fille, Joséphine, épouse Antoine Dieudonné Belle qui sera successivement juge, maire de Tours, député de l’Indre-et-Loire, sénateur de ce même département et l’un des 363 fondateurs de la IIIe république ; un buste à l'effigie du personnage orne la Place-du-14-juillet à Tours. De plus, une de ses petites-filles, Léonide-Désirée, a épousé l’économiste franco-suisse de renom Léon Walras (1834-1910), une autre Jeanne Sabine (1851-1933), est devenue vicomtesse, et un petit-fils, Henri Adolphe Laherrère (1898-1952), a été décoré de la Légion d’honneur. Cela dit, certains ont sombré dans la quasi-misère : au moins une Skottowe a grandi à l’Assistance publique, un autre est mort au bagne en Guyane à la suite d'un crime commis dans la Légion étrangère, alors que la plupart des autres ont vécu la vie des personnes de la classe moyenne. Ils portent ou ont porté les patronymes d’Aurange, Bernasconi, Boudon, Charmantray, Laherrère, Mailly, Pruvot, Villard, etc. Et toute cette histoire a débuté au 7, de la rue des Jardins à Québec.

Sources :

Archives départementales du Loiret, France.
Bibliothèque et Archives nationales du Québec.
British Library : IOR/D/158ff 297-98 1804 2 folios.
Diverses communications de Mme Marian Press, Toronto, Ontario.
Diverses communications de Mme Nicole Mauger, Paris, France.
État civil de La Ferté-Saint-Aubin, d’Orléans et de Tours.
The Morning Chronicle (Londres), 24 juin 1802.
The Times (Londres), 1871.


Cette recherche a été faite en collaboration avec madame Nicole Mauger.

Un triste imbroglio familial

Par Le 09/05/2020

            Le jour du mariage d’Adélard Godin avec Dorilda Levert[1], en 1909 à Hull, les invités à la noce sont loin de se douter que la vie ne fera pas de cadeaux au jeune couple. Peu instruit, Adélard est un homme ingénieux, un patenteux comme on disait dans le temps. Il a construit, seul, un très beau canot automobile qu'il fait voguer sur la rivière des Outaouais. Son sens inné de la mécanique l'a conduit à travailler dans la carrière de la Federal Stone où il dirige des travaux de concassage.

            Après sept ans et demi de mariage, les Godin forment un couple heureux entouré de trois beaux enfants. Le matin du 24 mai 1915, Dorilda a toutes les raisons de croire que la vie continue à lui sourire. Dehors, ça sent bon le printemps et, dans son ventre, elle a peut-être commencé à sentir les premiers remuements du bébé dont elle est enceinte depuis un peu plus de trois mois. Comme elle ne perd jamais une occasion de montrer à son mari combien elle l'aime, Dorilda a préparé, pour le dîner, un beau gâteau, car c'est le jour du vingt-neuvième anniversaire de naissance d’Adélard[2]. Mais midi est passé et Adélard n'est pas revenu à la maison. Dans la rue, elle a vu la plupart des maris des voisines regagner le foyer conjugal. Mais le sien n'est pas parmi ceux-là qui, étrangement, devisent à voix basse. Enfin, un homme s'approche de Dorilda et lui annonce que son mari vient de se faire tuer accidentellement à la carrière. La douleur est immense.

            Qu’était-il était arrivé au jeune contremaître de la carrière ? Il semble qu’il seAime raoul godin tenait près d’un concasseur mécanique quand sa chemise s’est coincée dans la courroie d’entraînement de cette puissante machine. Il aurait eu beau crier « Au secours ! », « Help ! », les ouvriers de la carrière, qui étaient tous unilingues d’origine polonaise, n’auraient pas compris les appels à l’aide d’Adélard. Aussi, a-t-il été broyé par le concasseur.

            Du jour au lendemain, la vie devient très difficile pour la jeune veuve qui vient tout juste d'avoir vingt-cinq ans. Mais Dorilda est une femme courageuse et pour subvenir aux besoins des siens, elle transforme une partie de son logement en épicerie. C'est peut-être derrière son comptoir que, deux ou trois ans après la mort de son mari, la jeune épicière fait la connaissance d'un jeune homme veuf, Philippe Boucher.

Catastrophe familiale

            Philippe Boucher s'amourache de la jeune veuve et un jour de l'été 1918, il la demande en mariage. Dorilda n'hésite sans doute pas à accorder sa main à cet homme qui l'aime assez pour lui proposer d'adopter les quatre enfants qu'elle a eus de son défunt mari, Adélard. Au mois d'août de la même année, le mariage est célébré à l'église Notre-Dame-de-Grâce de Hull. Dorilda croit renouer avec le bonheur. Mais un mois et demi plus tard, la grippe espagnole fait son apparition au Québec et, dès le 7 octobre, la panique commence à s'emparer de la population hulloise, car on compte dans la ville environ 700 cas de grippe. Une dizaine de jours plus tard, Dorilda Levert se sent malade à son tour et le 20 octobre elle ferme les yeux pour ne plus jamais les rouvrir.

            Pour Philippe Boucher, c'est la catastrophe. En deux mois et demi, il a été marié, il a pris en charge quatre enfants et il est redevenu veuf. Que faire? Il n'est pas le père légal des enfants de sa femme parce que, dit-on, la famille s'est opposée à leur adoption – on a probablement voulu s'assurer que l'homme était capable d'être un bon père. Quoi qu'il en soit, il est facile de comprendre qu'à cette époque il était difficile, voire impossible pour un homme seul, de travailler et d'élever en même temps quatre enfants. Boucher est donc mis devant un problème difficile à résoudre. Et c'est là que les témoignages divergent sur le comportement du malheureux époux. Les uns disent qu'il les a lâchement abandonnés[3] et d'autres affirment qu'en homme de coeur il a voulu les garder avec lui[4], mais que la famille légale s'y est opposée. Quoi qu'il en soit, les enfants sont dispersés, placés à l'orphelinat et plus tard, chez les parrains et marraines.

            Qu'est-il vraiment arrivé? Dorilda était propriétaire de sa maison située au 115, rue Saint-Laurent (aujourd’hui boulevard des Allumettières). Elle n'avait sûrement pas eu le temps de faire un testament avant sa mort et on aurait peut-être craint que son mari s'empare de la maison. Comme les familles Godin et Levert avaient des droits sur la maison, on n'aurait pas voulu que les titres de propriété soient transférés à Philippe Boucher. Mais ce n’est là que pure spéculation. En effet, qui peut se vanter connaître le fin fond de l’histoire sans document à l'appui ?

 

[1] Il était le fils de François Godin et d’Herménéline Vanasse et elle la fille de Jean-Baptiste Levert et de Délima Lacasse.

[2] Communication de Thérèse Godin-Séguin à l'auteur, le 28 juin 1993.

[3] Communication de Monique Godin Robidoux à l’auteur en janvier 2010.

[4] Communication de Cécile Brazeau Godin à l’auteur en octobre 1997.

L'étonnante famille de Jérémie Babin

Par Le 21/04/2018

         Comme tous les parents, Jérémie Babin voulait que ses enfants réussissent dans la vie et il prendra les moyens pour atteindre ce but.

        Né le 30 juin 1808 à l'Acadie où il est baptisé à l'église Sainte-Marguerite-de-Blairfindie le même jour, il épouse Flavie Pinsonneault le 15 novembre 1836 à Saint-Valentin. De ce mariage naîtront six enfants : Jérémie en 1837, Marie Aglaé en 1838, Jean Osias en 1840, Job Osiander en 1845, François en 1847 et Joseph en 1849. Fait étonnant, si les trois premiers enfants sont baptisés catholiques, le quatrième sera baptisé à l'Église baptiste, le cinquième dans un lieu inconnu et le dernier à l'église anglicane de Christieville au Québec.

        Sous l'influence de baptistes d'origine suisse de la Mission de la Grande-Ligne, les Babin se convertissent au protestantisme. Job est le premier des enfants Babin à être inscrit à la Grande-Ligne en 1845, Joseph vers 1847 et François vers 1850. Peu après la mort de Flavie Pinsonneault survenue vers 1857-1858, Jérémie père inscrit Jérémie, Job et Osias à la mission anglicane de Sabrevois soit pour des raisons de proximité ou par opportunisme. Joseph se joint à ses frères en 1860 alors que Marie-Aglaé, gravement handicapée, est reléguée dans une maison de pension à Saint-Jean (Iberville).

        Jérémie se remarie vers 1859, puis quitte le Québec pour les États-Unis, et s'établit à Kankakee, Illinois, en laissant un peu d'argent et la garde de ses enfants à son fils aîné sauf François, le cadet de la fratrie qu'il amène avec lui. Vers 1862, Job et Joseph rejoignent leur père à Kankakee, mais reviennent au Québec vers 1864 avant de retourner aux États-Unis en1866. Redevenu veuf, Jérémie épouse Caroline Lepage en 1870 à Kankakee dont il divorcera, puis meurt au même endroit en 1881.

        Chose pour le moins étonnante chez les Québécois de cette époque, les trois frères Babin étudient au Collège Bishop's de Lennoxville où ils obtiennent un baccalauréat ès art, soit en 1862 pour Osias, en 1863 pour Jérémie et en 1865 pour Job.

Jérémie fils

        Après un court stage à Trois-Rivières, Jérémie devient le pasteur anglican de Buckingham (aujourd'hui un quartier de Gatineau) en 1864. L'année suivante, il épouse Elizabeth Bailey Abbott, fille du pasteur de St-Andrew's (Saint-André-d'Argenteuil), de laquelle il aura deux enfants : Frances en (1866-1934), et Maude (1868-1940). En 1866, Jérémie abrite contre Abbott maude bac c 009479son gré sa sœur Marie-Aglaé que l'on trouve noyée dans la rivière du Lièvre le 12 avril 1866. Le pasteur est accusé de l'avoir assassinée. Après un procès tenu à Aylmer, Jérémie est reconnu innocent grâce au brio de son avocat et à l'inexpérience de l'avocat de la couronne, mais il se voit retirer son poste de pasteur.

        En 1868, Jérémie abandonne femme et enfants pour s'installer aux États-Unis, plus précisément à Cincinnati. Son épouse meurt de tuberculose à St. Andrew's le 11 novembre 1869. Quatre ans plus tard, Jérémie épouse Kate Moss (1843-<1910), à Louiseville, au Kentucky, dont il aura cinq enfants. Après avoir enseigné à Cooperstown, New York, il revient à Cincinnati où il dirigera, pendant quatorze ans, une école qu'il a fondée et qui atteindra une certaine renommée. Il meurt à la suite d'un accident de circulation au beau milieu de Cincinnati en 1913. Deux de ses enfants laisseront leur marque : Maude qui, sous le patronyme d'Abbot, deviendra une médecin réputée et experte mondiale en matière de cardiopathie congénitale, et Harry (1881-1956), qui deviendra pasteur épiscopalien.

Jean Osias

        Jean Osias entre dans la marine américaine en 1865 où il devient médecin. Il reçoit une « full commission » en 1876, puis est successivement promu commander et contre-amiral. En 1900, il demeure à Brooklyn, New York et il prend sa retraite en 1903. En 1869, il avait épousé Hattie Provost dont il a un fils en 1872, Provost Babin, qui deviendra un « naval officer ordinance ».

        Jean Osias, plus connu sous le prénom d'Hoseas, meurt le 25 octobre 1907 et il est inhumé au célèbre cimetière national d'Arlington en Virginie.

Job Osiander

        Job devient avocat vraisemblablement en 1870. Mais il ne pratiquera pas très longtemps, Babin harrycar il entreprend des études au General Theological Seminary de l'Église épiscopale de New York pour devenir pasteur. Après plusieurs années de diaconat, il est enfin ordonné pasteur en 1885 au Dakota. Il œuvrera en Californie, en Indiana, au Michigan et en Iowa auprès des Amérindiens. Puis il s'activera au Maryland ainsi qu'en Pennsylvanie et, enfin, à Schenevus, dans l'État de New York, où il prend sa retraite vers 1913. Toujours célibataire, il meurt à Schenevus le 28 décembre 1918.

François et Joseph

        On sait peu de chose de François sinon qu'en 1880 il vit à Medecine Lodge, au Kansas où il est stock raiser. Marié à une certaine Matilda, née au Wisconsin vers 1859 de parents canadiens, il a trois enfants dont deux sont nés au Michigan. Quant à Joseph, il devient enseignant à Kankakee où il épouse en 1876, Ida Clarida Wiltse dont il aura deux enfants. En 1880, on le retrouve agriculteur à Aroma, dans les environs de Kankakee. Il meurt de tuberculose à cet endroit le 10 avril 1883 à l'âge de 33 ans. Sa femme trépassera 23 ans plus tard (30 août 1906), à Chicago.

        Voilà en résumé l'histoire d'une famille québécoise au parcours exceptionnel.

Sources :

Lalonde, Jean-Louis, Babin, Job Osiander (1845-1918), s.l., 11 mai 2012.
Ouimet, Raymond, La mystérieuse affaire Babin, Montpellier, édtions des Hautes-Terres, 2007.

Catherine de Baillon : une énigme insoluble ? (II)

Par Le 25/10/2017

Les oncles de Catherine

       On ne sait rien ou presque des de la Roche, si ce n'est que leur mariage a eu lieu vers I601[i] et que le mari était l'un des cent gentilshommes ordinaires de la maison du roi et homme d'armes de la compagnie de Monsieur, frère unique du roi Henri IV. Notons toutefois que le couple aurait déjà été âgé d'une soixantaine d'années dans la décennie de 1640. L'autre couple était relativement bien nanti : Jehan de Fleury demeurait à Paris, quai des Célestins, paroisse Saint-Paul, avec sa famille et ses sœurs Louise et Lucresse. Il avait eu pour père un homme connu, René Fleury qui, avant sa mort survenue en novembre 1645 à Paris, avait été architecte et contrôleur général des bâtiments du roi. Si Jehan n'a pas suivi les traces de son père, il a néanmoins fait une belle carrière dans l'entourage des grands du royaume : chevalier du Saint-Empire, lieutenant de la galère nommée La Patronne[ii], puis devient gentilhomme de la grande bannière du roi, gentilhomme de la grande vénerie du roi et lieutenant de la louveterie du roi. Il fréquente le beau monde et en 1651, il prête la somme de I 000 livres à Louis le Vau qui, en 1654, deviendra le premier architecte du roi. Chose remarquable, c'est lui, Le Vau, qui édifiera l'hôpital de La Salpêtrière en 1657. Coïncidence étrange, c'est de cet hôpital que partiront pour Québec, en 1669, les filles du roi, dont Catherine de Baillon.

Quai celestins 1       Par ailleur, Jehan de Fleury était aussi le beau-frère d'un personnage considérable : Jehan Desmarets, sieur de Saint-Sorlin (1595-1676), ancien intendant du cardinal de Richelieu, un des fondateurs de l'Académie française, il a été secrétaire général de la marine du Levant, contrôleur général de l'extraordinaire des guerres et poète. Ainsi, Jehan de Fleury avait sans doute les moyens de venir en aide à sa belle-sœur, Louyse de Marle, même s'il avait lui-même cinq enfants, trois garçons et deux filles. Ajoutons qu'il semble avoir été relativement proche de sa belle-sœur, puisqu'il avait été tuteur de ses enfants à la mort d'Alphonse de Baillon. D'ailleurs, Louyse et Jehan  correspondaient comme en fait foi un certificat du 28 novembre 1655[iii].

Mise à l'écart ?

       Pourquoi Louyse de Marle aurait-elle confié sa fille cadette à un parent ? Parce qu'elle était démunie ? Il est vrai qu'à la suite de la mort de son époux, en novembre 1648, elle avait été « réduitte à mourir de faim[iv] ». Mais cette pauvreté n'a pas perduré puisque le 17 mai 1649, elle convolait en secondes noces avec un Gévaudané, Marq d'Amanzé, sieur de Lafon. Ainsi, l'absence de Catherine de Baillon, dans les registres des paroisses de la vallée de Chevreuse, reste encore inexplicable.

       Catherine aurait-elle été mise à l'écart ? En tout cas, le 11 octobre 1673, Louyse de Marie faisait donation de tous ses biens à son fils Antoine de Baillon, mais donnait 600 livres à sa fille cadette non sans souligner que ce n'était pas la première fois :

[...] pour tous leurs droits quelle pouvoit pretendre en la Succession Laquelle Somme luy sera payé Moytié Six mois Apres Le deceds de lad. donnatrice et lautre moytié Six mois apres Sans Aucun Interest declarant lad. damoiselle donnatrice Avoir fourny dautre Sommes Notables pour lad. damoiselle Catherine baillon qui font plus que Son esgallité Avec lad. Louise de baillon son Autre fille[v].

       À la mort d'Antoine de Baillon, survenue au mois d'août 1685, Catherine est écartée de la succession comme si elle avait été une étrangère[vi]. Or, la famille savait qu'elle vivait encore et qu'elle résidait en Nouvelle-France. Et les héritiers de Catherine mettront 59 ans pour récupérer la part de leur mère dans la succession de leur oncle mort sans testament.

En résumé :

           Catherine de Baillon n'apparaît pas dans les registres de la vallée de Chevreuse ;

Sans être riche, la mère de Catherine vit confortablement ;

La famille de Catherine a des alliés dans l'entourage des grands du royaume ;

Catherine est une des 150 filles à marier tirées de la Salpêtrière pour le Canada ;

Louyse de Marle déclare avoir donné plus à Catherine qu'à son autre fille Louise ;

Catherine est ignorée lors du partage de la succession de son frère.

Conclusion

       Si nous ne relevons pas le nom de Catherine de Baillon en vallée de Chevreuse, il faut conclure qu'elle n'y a pas vécu longtemps. A-t-elle habité chez la parentèle ou a-t-elle été placée à la Salpêtrière dès l'ouverture de l'hôpital ? Quels rapports entretenait-elle avec sa famille ? Ces questions sont toujours sans réponse et l'énigme de Baillon reste entière. Néanmoins, nous pouvons toujours espérer qu'un jour un document répondra à nos questions.

 


[i] Contrat de mariage du 18 mai 1601, cité dans les Mémoires de la Société de généalogie canadienne-française, vol. 1,1944, page 39.

[ii] La Patronne était la seconde galère la plus importante de la flotte française. Elle était montée par le lieutenant général des galères.

[iii] ANF, Paris, MC/ET/LlV/320.

[iv] Archives départementales des Yvelines, Registre des audiences du baillage de Chevreuse, 11 novembre 1658, B287.

[v] ANF, Paris, Y227 F679, minutier Douer et Coutellier, 11 octobre 1673. Acte de donation de Louise de Marie à ses enfants.

[vi] Pour de plus amples détails, voir OUIMET, Raymond et MAUGER, Nicole, Catherine de Bâillon, enquête sur une fille du roi, Québec, Éditions du Septentrion, 2011.

Catherine de Baillon : une énigme insoluble ? (I)

Par Le 18/10/2017

          S'il est une fille du roi qui fait parler d'elle chez les généalogistes nord-américains, c'est bien Catherine de Baillon, dont le mystère de la vie en France reste entier[i]. Nous en connaissons plus sur son frère, sa sœur et ses demi-sœurs que sur elle-même, ce qui n'est pas peu dire.

       Nous savons, grâce à divers documents judiciaires et notariés, que Catherine est née sans doute aux Layes[ii], en mai 1645. Elle est la cinquième des enfants d'Alphonse de Baillon, mais la troisième de Louyse de Marle[iii]. Alphonse avait épousé, en 1627, Claude Dupuy, de laquelle il avait eu deux enfants, Élisabeth et Claude-Marie, dont les noms apparaissent souvent dans les registres de Saint-Nom-de-Lévis et de Neauphle-le-Chastel. Devenu veuf, Alphonse épouse en secondes noces Louyse de Marle de qui il aura cinq enfants, dont un qui ne semble pas avoir vécu.

Sa fratrie

       Le premier enfant d'Alphonse et de Louyse se nomme Antoine. Né en 1643, il fait carrière auprès du duc de Verneuil, oncle de Louis XIV, comme page, écuyer et premier écuyer, puis auprès du Grand Dauphin comme lieutenant de sa louveterie. Enfin, il se voit confier le poste de gouverneur du Pont-de-l'Arche, sans doute grâce au duc de Montausier, pair de France, gouverneur de la Normandie. Par ailleurs, il fréquente une femme du clan Montausier, Marie Marthe Druel de Beauregard[iv], originaire de Normandie, qu'il épousera en février 1683 à la suite d'un contrat de mariage signé par plusieurs grands personnages du royaume, dont Louis XIV et sa femme, Marie Thérèse d'Autriche.Les layes

       Antoine n'est pas resté inconnu en vallée de Chevreuse : il y a été parrain d'Antoine Couillabin, le 18 avril 1658, à Saint-Nom-de Lévis, puis de son neveu, Antoine Jules Pocquet, le 24 avril 1676, à Senlisse. Il est aussi parrain de quatre autres enfants, mais cette fois à Vemeuil, où il habite jusqu'à la mort du duc.

       Le deuxième enfant du couple, Louise, naît en 1644. Le nom de cette dernière apparaît neuf fois comme marraine en vallée de Chevreuse : la première fois à Saint-Nom-de-Lévis, en 1655, alors qu'elle n'a que 11 ans. En 1673, elle épouse un petit noble, originaire de Flamanville en Normandie, Jacques Pocquet, sieur de Champagne, brigadier des gardes du duc de Montausier, dont elle aura trois enfants. À sa mort, survenue en 1681, Pocquet était premier brigadier des gardes du duc de Crussol ; il a été inhumé aux Layes en présence des curés de Cernay, des Layes, de Saint-Forget, de Senlisse, de Flamanville, et d'un prieur et d'un sous-prieur[v]! Louise se remarie, après neuf mois de deuil, avec Jacques Stoup, écuyer, officier de la vénerie du duc d'Orléans ; elle est enceinte de trois mois[vi]. Stoup sera parrain d'au moins cinq enfants dans la vallée de Chevreuse et témoin à dix mariages.

       En ce qui concerne Catherine, son nom n'apparaît pas une fois aux registres des Layes, ni dans les registres des paroisses environnantes comme Auffargis, Les Essarts-le-Roi, le Mesnil-Saint-Denis, Saint-Nom-de-Lévis ou autres lieux proches. Mais alors, où a-t-elle résidé ? On se doit d'avancer l'hypothèse suivante : Catherine n'a jamais vécu avec sa famille si ce n'est dans son enfance. D'ailleurs, lors de son mariage avec Jacques Miville, le 12 novembre 1669, à Québec, elle dit que ses parents sont de Montfort l'Amaury, une localité située à environ quinze kilomètres au nord des Layes, ce qui semble indiquer qu'elle ne connaissait pas le lieu précis de résidence de ses parents. Or, ceux-ci ont toujours vécu aux Layes et à Saint-Nom-de-Lévis[vii]. Catherine aurait-elle passé son adolescence et les débuts de sa vie adulte ailleurs, chez d'autres membres de la famille ? Peut-être. Elle avait deux tantes qui portaient son prénom et qui auraient pu être ses marraines : Catherine de Baillon, épouse de Jean de la Roche, écuyer, sieur de Saint-Amant, et Catherine de Marle, épouse de Jehan Fleury, sieur de Violette. (À suivre)


[i] L'auteur remercie Mme Nicole Mauger, son associée de longue date dans cette recherche sur Catherine de Bâillon et des siens, pour sa contribution.

[ii] Aujourd'hui, Les Layes fait partie de la commune des Essarts-Ie-Roi, dans le département des Yvelines et se situe à environ 45 kilomètres au sud-est de Paris.

[iii] Elle était enceinte d'un quatrième enfant à la mort de son mari en novembre 1648. Cet enfant ne semble pas avoir vécu.

[iv] Une de ses sœurs, Élisabeth, était l'épouse de Daniel Clinet de la Chastaigneraye, trésorier des enfants de France. Une autre, Catherine, était femme de chambre du duc d'Anjou.

[v] État civil des Layes conservé dans la commune des Essarts-le-Roi.

[vi] Ce couple aura deux enfants.

[vii] Aujourd'hui Lévis-Saint-Nom.

Records de mariages et d'enfantements

Par Le 02/02/2014

          Au Québec, nous faisons peu d'enfants. Ça n’a pas toujours été le cas. Il y a moins de 50 ans, une famille standard comptait 4 enfants, et il y a 75 ans, elle en comptait 7. Au XIXe siècle, le gouvernement donnait une terre à la famille qui comptait 12 enfants vivants. Aujourd’hui, les familles comptent en moyenne moins de 2 enfants (1,4), et pourtant, jamais elles n’ont été aussi riches. Ce n’est donc pas une question d’argent.

          Quelle est la femme qui a donné naissance au plus grand nombre d’enfants ? J’avoue que je ne le sais pas. Mais, dans ma famille, j’ai un cas assez intéressant. Il s’agit de Marie Délia Rancourt, la seconde épouse de mon arrière-grand-père, David Turgon, qui a eu 24 enfants dont 23 viables ! Elle avait 15 ans à la naissance de son premier enfant et 42 à celle de son dernier. Elle est morte en 1966 à l’âge de 81 ans à Astorville, dans le Moyen-nord ontarien.Turgon david famille

          Vingt-quatre enfants, c’est loin d’un record. Parce que, voyez-vous, une certaine madame Bernard Scheinberg (Autriche) aurait eu… 69 enfants ! Elle est morte à l’âge de 58 ans. Son mari s’est alors remarié et a eu 18 enfants de sa seconde épouse. Apparemment, une Russe aurait encore fait mieux. En effet, madame Fiodor Vassiliev aurait eu 69 enfants en 27 grossesses : 4 fois des quadruplés, 7 fois des triplés et 16 fois des jumeaux.

          Évidemment, les hommes peuvent engendrer plus fréquemment que les femmes. Mais qui en a légitimement fait le plus au Québec ? Il semble que ce soit Pierre Lepage (1872-1948) de Montréal qui en aurait conçu officiellement pas moins de 42, dont 39 viables, avec 3 épouses différentes. En Outaouais, on dit que la palme revient à Jean-Baptiste Groulx, de la paroisse du Très-Saint-Rédempteur de Hull, qui aurait conçu 35 enfants au cours d’une vie ponctuée par 3 mariages. Il est mort en décembre 1910, à Hull, à l’âge de 68 ans.

          N’ayez crainte, Jean-Baptiste Groulx n’est pas mort épuisé à la tâche. La preuve en est que d’autres en ont fait plus que lui. Parmi ceux-ci, le célèbre écrivain Alexandre Dumas, père, a prétendu avoir procréé pas moins de... 250 enfants ! Des historiens soutiennent cependant que le romancier avait tendance à exagérer ses exploits et qu’il n’en aurait fait qu’une petite... centaine à ses 34 maîtresses ! Ce qui peut nous sembler un record a été battu, et de loin, par le sultan Abou al-Hasan (XIVe siècle) qui, lui, aurait conçu 1 862 enfants. Difficile de faire plus, non ? Heureusement, le romancier Georges Simenon a créé plus qu’il n’a procréé, lui qui s’est vanté d’avoir couché avec... 10 000 femmes au cours de sa vie !

Records de mariages

          C’est bien beau de faire des enfants, encore faut-il être deux. Qui a eu le plus grand nombre de conjoints « légaux », et dûment consignés au Canada-Français et sans avoir divorcé ? Il s’agirait de Pierre Vandal (1859-1948), né à Saint-Simon, comté de Bagot, du mariage de Narcisse Vandal avec Marie Arpin. Ce Québécois a convolé 8 fois en justes noces ! Ce qui est encore plus étonnant, dans ce cas là, c’est que Vandal a vécu 19 ans avec sa première épouse, Emma Boudreau, et qu’il est resté veuf... 21 ans après la mort de la deuxième ! Il est mort à l’âge de 89 ans, enterré par sa dernière épouse, Mina Pilotte.

Georges simenon          Chez les femmes, il semble bien que ce soit Anne Jousselot qui a eu le plus grand nombre d’époux : 5. Née vers 1759 du mariage de Pierre Jousselot avec Ozanne Drapeau, elle a pris époux une première fois en 1677 et une dernière fois en 1725. Elle est morte à l’âge de 83 ans, ce qui est plutôt bien pour l’époque ! Évidemment, nous sommes loin du roi Salomon qui aurait eu, dit-on, mille épouses ou concubines !

          N’est-ce pas le Tout-Puissant qui dit un jour : « Il n’est pas bon que l’homme vive seul » ? Mariage et remariage entraînent parfois des situations complexes. Prenons, pour exemple, la famille de Toussaint Minville, dont les 3 épouses lui ont donné pas moins de 19 enfants. Ce personnage, qui a d’abord vécu dans les Deux-Montagnes, s’est installé dans les années 1860 dans l’Est ontarien, plus précisément à Saint-Eugène-de-Prescott. Il s’était marié une première fois en 1849, une deuxième fois en 1864 et une troisième fois en 1877. Alors qu’il a 50 ans, sa 3e épouse, Octavie Beaulne, en a elle 28. Mais le plus intéressant est qu’Octavie est la sœur des épouses de deux des fils de Toussaint ! Une de ses sœurs étant devenue veuve, elle épousera un troisième fils de Toussaint : Le père et trois fils mariés aux trois sœurs Beaulne.

Sources :

BMS 2000
Documentation personnelle.
Le Temps (Ottawa), 16 décembre 1910.
Mémoires de la Société généalogique canadienne-française, vol 27, no 3, p. 173.
TANGUAY, Cyprien, À travers les registres, p. 122.

 

À la recherche d'une identité

Par Le 29/10/2013

Saviez-vous qu’après le sexe, la généalogie est le sujet le plus populaire sur Internet ? Quand on pense que, sans le sexe, nous n’existerions pas et, par conséquent, la généalogie non plus. Mais si on comprend pourquoi le sexe est si populaire plusieurs se demandent pourquoi la généalogie prend autant de place sur Internet. Sans doute tentons-nous, inconsciemment peut-être, de répondre à trois questions existentielles que l'humanité se pose depuis des millénaires : D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ?

 

Et ces questions n’ont jamais été aussi importantes qu’en ce début de XXIe siècle, car tout change maintenant à un rythme effréné, ce qui fait qu’il est de plus en plus difficile de se faire des racines, de s’attacher ou de s’identifier à un lieu. Par exemple, pour une personne vivant à Deschênes depuis une trentaine d’années, son milieu de vie municipal en est à son troisième nom : Deschênes, Aylmer puis Gatineau (on peut dire la même chose de Janesville-Eastview-Vanier-Ottawa et de combien d’autres municipalités…) Ajoutons les multiples autres changements de noms, ceux des hôpitaux par exemple : Hôpital du Sacré-Cœur, CHRO, CHVO et ne parlons pas des commissions scolaires, des CLSC, etc. Même les biblios changent de nom à un rythme foudroyant, par exemple : la bibliothèque de Gatineau est devenue la bibliothèque Avenor, puis Bowater et maintenant Guy-Sanche. Tout ça en une douzaine d’années ! Difficile de se retrouver dans un monde gouverné presque essentiellement par le changement et des valeurs économiques, n’est-ce pas ?

 

Or, on ne peut pas vivre, comme individu, sans s'inscrire dans une lignée, une tradition et un groupe. On est de quelque part et le déracinement ainsi que la mobilité sociale ne font, paradoxalement, que stimuler ce désir de se rattacher à un lieu.

 

D'OÙ VENONS NOUS ?

 

Sur l'arbre de chacun de nous se trouvent perchés, souvent côte à côte, l'ouvrier et le paresseux, la sainte femme et la courtisane, le savant et l'idiot, le curé et le criminel, le notaire et le bourreau. Il n'y a pas de petits rôles dans la comédie humaine. Ne dit-on pas que ça prend de tout pour faire un monde?. Mathieu, l'évangéliste, qui connaissait les Écritures comme personne, nous fait découvrir des personnes peu recommandables dans son énumération des ascendants de Jésus : Thamar l'incestueuse, Rahab la prostituée, Bethsabée l'adultère. Et comme l'a si bien écrit Henri Guillemin : « C'est ainsi, et c'est très bien. Car Jésus-Christ a voulu appartenir au monde tel qu'il est, y compris les coupables. »

 

Wilfrid Raby, chercheur en neuropsychologie à Cleveland, a écrit que : « Nous sommes les récipiendaires d'un terreau génétique d'où peut surgir toute la splendeur de la culture comme toute la souffrance de vivre. »

 

La psychanalyse, toujours en recherche d’explications nouvelles à nos souffrances internes et à nos comportements, découvre petit à petit que des secrets que nous ignorons complètement peuvent nous imprégner et dicter nos conduites à notre insu. Sans rien savoir de ce qui nous a précédé, nous pouvons reproduire les actes, les pensées, les maladresses, les gestes parfois mortels.

 

          L'étude de la généalogie montre que la vie est très complexe. Chacun de nous doit son apparence physique, son comportement psychologique même, au mélange des gênes de milliers voire de millions de personnes. La psychiatre Catherine Bensaid croit que nous avons une mémoire trans-générationnelle qui influe sur chacun de nos actes : nous sommes ainsi conditionnés à répéter certains comportements identiques à ceux de nos ancêtres, à perpétuer à notre insu un mode de pensée emprunté à ceux qui nous ont précédés. Est-ce là ce que d'aucuns appellent le destin? Ajoutons que l'historien et académicien français Georges Duby était convaincu que : « Nous vivons encore portés par tout ce que nos ancêtres très lointains ont fait et pensé.»



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La généalogie en 2013

Par Le 27/10/2013

          La généalogie est l’un des passe-temps les plus populaires des temps modernes. Sa pratique est maintenant renforcée par de nouveaux outils : l’informatique et l’Internet. Dans de nombreux cas, au Québec, on peut dresser une généalogie patrilinéaire en 24 heures. La généalogie est le sujet le plus populaire sur Internet, après le « sexe ».

 

          La généalogie remonte presque au début de l'humanité. La bible en traite d'ailleurs abondamment tant dans l’Ancien Testament que dans le Nouveau. L'histoire de la Grèce antique est aussi remplie de préoccupations généalogiques. Il y a entre les dieux et les hommes un lien généalogique ininterrompu : Héraclès, fils adultérin de Zeus et d'Alcmène, cette dernière simple mortelle et fille du roi Mycènes, était le demi-frère d'Artémis et d'Apollon.

 

          Dans le Nouveau Testament, les évangélistes Luc et Mathieu essaient de démontrer, bien malhabilement, que Jésus a réalisé la promesse des écritures, faite jadis au roi David par l'intermédiaire du prophète Natan qui disait que le roi sauveur attendu devait être un descendant de David. Ils font ainsi une généalogie de Jésus qui établit l'ascendance de Joseph, son père, jusqu'à Adam pour le premier, et à Abraham pour le second. Mais voilà, si Joseph est le géniteur de Jésus, le dogme de la virginité de Marie ne devient-il pas caduc ?

 

          La généalogie est très populaire au Québec parce que les lois françaises se sont longtemps appliquées. Il faut savoir que dès 1539 le royaume de France a ordonné (Villers-Cotterêts) la tenue, par les curés, de registres de baptêmes et de sépultures, puis de mariages. Ainsi, trouve-t-on, au Québec, des registres d’état civil bien conservés qui remontent au premier tiers du XVIe siècle. Or, comme les actes de mariage contiennent les noms et prénoms des parents des mariés, il est donc facile de retrouver les ancêtres d’une famille. D’autant plus qu’au Québec, la femme a toujours conservé son patronyme dans les actes officiels.famille-turgon.jpg

 

          Tous peuvent avoir accès à ces registres, des débuts de la colonie jusqu’en 1941. Il faut savoir que tous les registres catholiques d’état civil du Québec, et une partie des registres de l’Ontario français ont été microfilmés dans les années 1940 et 1950, par l’Institut de généalogie Drouin, puis ont été numérisés il y a quelques années. Tous les actes du Québec ancien (début à 1800) ont même été indexés dans le Programme de recherche en démographie historique (PRDH). De plus, environ 80 p. 100 des actes de mariages célébrés au Québec, du début de la colonie à aujourd’hui, sont relevés dans une base de données appelée BMS 2000.

 

          On trouve de nombreux dictionnaires généalogiques dans nos bibliothèques publiques. Mais les instruments les plus pointus se trouvent dans les sociétés de généalogie locale. Celle de l’Outaouais se trouve à la Maison de la culture de Gatineau http://www.genealogieoutaouais.com/ Pour en devenir membre, il faut verser une cotisation d’une trentaine de dollars par année.

 

          Mais de nombreuses banques de données se trouvent aussi sur Internet et peuvent être consultées contre une somme modique. C’est le cas de celle de BMS 2000 et du PRDH (http://www.genealogie.umontreal.ca/fr/), par exemple. De nombreuses sociétés généalogiques mettent aussi leurs bases de données sur la toile. On peut même faire des recherches d’actes d’état civil et obtenir une copie d’un acte original dans la base de données Ancestry.ca (http://www.ancestry.ca/). Cette base de données est même disponible en… français.

 

          Certaines bases de données vous permettent même d’en connaître plus sur vos ancêtres. Par exemple, vous aimeriez savoir si votre arrière-grand-père a participé à la Grande Guerre comme soldat canadien. Eh bien, vous pouvez consulter la base de données des soldats de la Première guerre mondiale de Bibliothèque et Archives nationales du Canada (BAC) (http://www.collectionscanada.gc.ca/base-de-donnees/cec/001042-100.01-f.php).

 

          Dans cet outil fabuleux qu’est l’Internet, on trouve une banque de données mondiale, GÉNÉANET (http://www.geneanet.org/) qui est… gratuite, car elle contient d’abord les données de tous ceux et celles qui veulent partager leurs données généalogiques. Ainsi, cette banque de données recense-t-elle pas moins de 331 245 556 individus !

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