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Histoires de cœur d'autrefois

ouimet-raymond Par Le 04/02/2023

Dans Histoire locale

          Quel puissant sentiment que celui de l’amour ! Il peut tout autant rendre heureux que malheureux ; il peut faire perdre la tête ou susciter la haine. Mais qui voudrait s’en passer ? Retour sur des amours d’autrefois.

          Il est difficile de résister à l’amour surtout pour un homme de la famille Papineau mis en présence d’une douce et jolie jeune femme intelligente. De fait, peu d’hommes peuvent se passer de la plus belle créature du monde ! Amédée Papineau, fils de l’illustre Louis-Joseph disait : Quant aux récréations dignes de l’homme, je n’en connais que quatre : les livres d’abord, puis les femmes, et la chasse et la pêche. Donnez-les-moi et mon paradis terrestre est complet. Disons que je n’aurais pas classé ces quatre « récréations » dans le même ordre !…

          Louis-Joseph Papineau était tombé amoureux, à l’âge de 78 ans. Il avait alors éprouvé pour une jeune couventine de 15 ans, Marie-Louise Globensky, une « amitié amoureuse » qui se manifestait dans sa correspondance. Ainsi, lui a-t-il écrit : Vienne le mois de juillet que vous soyez caressée […] que vous dormiez bien pendant la nuit sans que cela vous empêche de vous étendre sur mes genoux quand vous voudrez et aussi quand je vous en prierai […]

          Mais revenons à Amédée. Veuf depuis 1890, il avait à son emploi une jeune fille, Jane Papineau amedeeCurren, qu’il a adoptée vers 1894 et lui a donné le prénom de Iona. L’année suivante, il en tombait amoureux ; elle avait 23 ans et lui en avait… 76 !. Est-ce elle qui lui a ouvert sa couche un soir du mois de mai 1896 ou si c’est Amédée qui a trouvé le moyen de s’y glisser ? L’Histoire nous enseigne que ce sont généralement les maîtres qui s’imposent dans le lit des domestiques. D’ailleurs, on se demande bien comment le barbon pouvait séduire une femme de 53 ans sa cadette – il aurait pu être son grand-père ! Quoi qu’il en soit, il a épousé sa fille adoptive à New York le même mois. De ce mariage, naîtront deux enfants : Lafayette en 1897 et Angélita en 1901, soit 82 ans après la naissance de son père qui meurt à l’automne 1903.

Le coup de foudre

          ll n’y a pas d’âge pour le coup de foudre, surtout quand on est en manque de tendresse ! Ainsi, un mardi soir du mois d’août de 1906, le docteur Gustave Paquet, 47 ans et veuf depuis 4 ans, et Annonciade Routhier, une veuve de 49 ans, sont présentés l’un à l’autre par des amies communes qui cherchent à former un couple avec ces deux âmes esseulées. Contre toute attente, à part le fol espoir des deux entremetteuses, les deux veufs se plaisent tant qu’on ne peut expliquer la suite des événements que par un coup de foudre réciproque. En effet, les deux amoureux décident, dans les heures suivant leur rencontre de s’épouser le plus rapidement possible, et pourquoi pas, le lendemain même ? Ainsi, le mercredi, les nouveaux amoureux réussissent à signer un contrat de mariage (c’est beau de perdre la tête, mais quand même…) à obtenir une dispense de trois bans de mariage et à se marier en soirée à l’église Notre-Dame-de-Grâce à Hull. Même à Las Vegas on ne fait pas mieux !

          Tous ne sont pas prêts à s’engager aussi rapidement, mais il y en a plus qu’on ne le croit généralement. Sam Renaud était un cultivateur du canton de Masham âgé de 60 ans et veuf depuis un certain temps. Un beau jour de 1908, il fait la connaissance d’une veuve de 41 ans nommée Sarah Meunier. Les deux âmes esseulées ne se sont vues que deux fois en trois semaines, quand ce coquin de Cupidon pousse soudainement Sam à demander Sarah en mariage. Enchantée, la quadragénaire accepte la demande de Sam. En femme d’expérience, elle mandate son notaire pour qu’il rédige un contrat de mariage dans lequel son soupirant doit lui faire un don de 200 dollars. Le contrat signé, Sam prépare le mariage. Ainsi, le dimanche 13 septembre 1908, les deux amoureux se rendent à l’église Sainte-Cécile. Sarah s’assoit dans le premier banc, et Sam tout à l’arrière. Quand le prêtre dit Ite missa est – la messe est finie – Sam s’imagine que Cupidon est en train de lui jouer un mauvais tour. Il se lève, hésite un instant, puis quitte l’église précipitamment en abandonnant à sa peine Sarah.

          Six semaines plus tard, Sarah apprend que Sam… a convolé avec une autre veuve, Agnès Desjardins, à qui il a fait, auparavant, une donation de… 500 dollars ! C’en était trop. Sarah ne pouvait laisser l’affront impuni et son cœur meurtri sans soins ou sans consolation. C’est alors qu’elle décide de poursuivre Sam en justice. À son avis, seul un dédommagement de 999 dollars pouvait rétablir la cadence des battements de son cœur. Mais c’était trop demandé pour un organe qui battait quand même depuis 41 ans ! – le juge lui aura adjugé la somme de… 375 dollars !

La lettre d’amour

          Qui dit amour dit aussi lettre d’amour. J’en ai trouvé une qu’a écrite Louise Ouimet en 1943, sans doute à la suite d’une fausse couche. Épouse deOuimet louise Fernand Cousineau, elle avait alors 22 ans et perdu son seul et unique enfant en mai 1942 :

Hull, le 2 décembre 1943. C’est à l’occasion de ton anniversaire de naissance que je viens te faire mes vœux de bon souhait. Je te souhaite de tout mon cœur et toutes mes forces Bonne Fête, santé, bonheur, longue vie, et beaucoup de succès dans tes entreprises. La raison pour laquelle je ne puis te les souhaiter  de vive voix est que j’ai le cœur bien gros et je ne pourrais pas les souhaiter à mon aise comme je le voudrais et c’est pour cela que je les fais sur ce bout de papier. Mais crois-moi, c’est des vœux sincères que je t’ai faits. Je te fais ce petit cadeau, ce n’est pas grand-chose, mais je crois que tu l’apprécieras. J’aurais voulu faire plus pour toi, car tu es mon unique amour et j’apprécie tout ce que tu fais pour moi. Tu es le meilleur mari qu’une personne peut avoir pour sure (sic). De ta femme qui ne t’oublie pas et qui t’aime et t’aimera toujours sois sans crainte. Louise qui t’embrasse bien fort.

          Louise est décédée le 7 octobre 1995 à Gatineau, sans postérité, huit ans après son mari, Fernand.

SOURCES

Documentation familiale personnelle.
OUIMET, Raymond, Histoires de cœur insolites, Hull, éd. Vents d’Ouest, 1994.
PAPINEAU, Amédée, Journal d’un fils de la liberté 1838-1855, texte établi avec introduction et notes par Georges Aubin, Sillery, 1998.