La tuberculose : fléau du XXe siècle

Par Le 03/06/2020

Dans Histoire du Québec

          La tuberculose, longtemps appelée la peste blanche, a hanté nos parents et nos grands parents. Dès que quelqu’un toussait, crachait du sang, on s’éloignait de lui. Presque éradiquée de l’Amérique du Nord depuis les années 1970, elle revient dans de nombreux pays, dont des villes des États-Unis (New York par exemple) où les pauvres sans le sou ont de la difficulté à recevoir des traitements médicaux.

          La tuberculose a été la maladie emblématique du XIXe siècle, que l'on connaissait, au Canada français, sous le nom consomption, et en Europe sous celui de phtisie. C’était la maladie romantique par excellence, affligeant de préférence les poètes et les âmes sensibles. Alexandre Dumas fils, dans son oeuvre maîtresse La dame aux camélias, Dame aux cameliasnous en fournit un exemple célèbre. Cette maladie était tellement à la mode que pour ressembler aux tuberculeuses, les femmes évitaient le soleil pour avoir la peau blanche, dessinaient au crayon bleu leurs veines pour les rendre apparentes et mettaient de l’atropine dans leurs yeux pour les rendre plus sombres !

Les sanatoriums

          La tuberculose n’était pas une maladie facile à guérir. Un médecin allemand, Herman Brehmer, lui-même guéri de la tuberculose des poumons après un séjour dans l’Himalaya, a ouvert un premier sanatorium en 1856. Convaincu que l’air froid de la montagne l’avait sauvé, le médecin avait mis au point une cure, basée sur l’exposition au grand air, l’alimentation et le repos, qui va se répandre en Europe et faire la fortune de nombreux établissements alpestres. Cela donnait aux médecins l’illusion de faire quelque chose. Au départ, les sanatoriums étaient réservés à une clientèle de privilégiés et ressemblaient à des hôtels de luxe en montagne. À défaut de meilleur remède, la cure sanatoriale s’est propagée aux États-Unis, puis au Canada, où le premier établissement a été construit en 1897 au lac Muskoka.

          On ne connaissait pas le caractère contagieux de la maladie qui était tenue pour être une tare héréditaire. Ce n’est qu’en 1865 que le Français Antoine Villemin a prouvé que la tuberculose était causée par un organisme spécifique et contagieuse. Mais il faudra attendre l’Allemand Robert Koch et plus de 45 ans avant que les sceptiques soient convaincus du caractère pernicieux de la maladie.

          Dans l’imaginaire populaire, le poitrinaire de l’ère romantique est devenu un cracheur de bacilles, et la maladie de la Dame aux camélias un symbole de la saleté, du désordre et de la promiscuité associé à l’industrialisation. Elle suscitait la honte et le rejet des personnes infectées. Le sanatorium est alors devenu partie d’une vaste stratégie visant à prévenir la contagion en isolant les malades et en leur enseignant l’hygiène.

          En 1909, la tuberculose était, au Québec, la maladie infectieuse la plus répandue et la plus meurtrière, responsable d’au moins 33 000 décès entre 1896 et 1906. Un an plus tôt, un premier sanatorium québécois avait vu le jour à Sainte-Agathe. Considérée comme l’ennemi public numéro un, les autorités organisent une véritable croisade contre la tuberculose. Dans les années 1920, on a ouvert des sanatoriums publics. En 1951, on recensait pas moins de 18 sanatoriums dans la province. L’Outaouais s’est vu doté d’un sanatorium en 1935 : le sanatorium Saint-Laurent, à Hull (aujourd’hui l’hôpital psychiatrique Pierre-Janet). À Ottawa, le sanatorium Lady Grey Hospital (rue Carling) avait ouvert ses portes en 1910.

          Ces sanatoriums étaient de véritables stationnements àSanatorium st laurent tuberculeux organisés pour recevoir et traiter le plus grand nombre de patients possible. Certains étaient équipés de laboratoires et de salles de chirurgie dits « modernes ». Tout en appliquant la cure, les médecins cherchaient d’autres moyens pour soigner les malades, car les sanatoriums ne suffisaient pas à endiguer l’épidémie.

Les traitements

          Parmi les opérations pratiquées, surtout à partir des années 1930, la plus courante était la collapsothérapie. Cette intervention consistait à provoquer un affaissement du poumon, pour y réduire la quantité d’oxygène. Cette intervention pouvait causer de sérieuses complications et même la mort du malade. Elle entraînait des déformations thoraciques et des déviations de la colonne vertébrale. Parfois, elle semblait contenir l’étendue des lésions ! Parmi les gens atteints de tuberculose active, 50 p. 100 mouraient, 25 p. 100 demeuraient des malades chroniques pendant de longues années et 25 p. 100 connaissaient une guérison spontanée. Le seul fait de se reposer entraînait parfois la guérison.

          Tout au long du XXe siècle, la mortalité due à la tuberculose n’a cessé de diminuer. Non pas à cause des sanatoriums, mais surtout à cause des facteurs socioéconomiques, l’amélioration de l’hygiène et l’alimentation, ainsi que la vaccination et les antibiotiques.

Sources :

BOURDON, Marie-Claude, Dans les couloirs du sanatorium, Québec Science (Montréal) avril 2008, pp. 37-40.

CÔTÉ, Louise, En garde ! – Les représentations de la tuberculose au Québec dans la première moitié du XXe siècle, Québec, Les Presses de l’Université Laval, 2000, pp. 32 et 33.

Le Petit Journal (Montréal), 6 novembre 1927.